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tout autre, enfin, et c’est là son éternel honneur, il représente, dans ce troublé et violent XVIe siècle, les qualités distinctives du génie français, c’est-à-dire la mesure, le bon sens, et le pantagruélisme, quelque bizarre et choquante qu’en soit trop souvent la forme, n’est au fond que la philosophie de la liberté.

Intolérance des papimanes, intolérance des papefigues, Rabelais les repousse toutes deux également ; il devance son temps et, comme le dit M. Nisard, « il tend la main, par dessus quarante années de guerre civile, aux auteurs de la Ménippée ».

III

La mort de Henri II, quelques mois après l’enregistrement forcé de l’édit sur l’Inquisition, qui mettait le Parlement et la France aux pieds de Rome, clôt l’ère des transactions et des batailles de plume, pour inaugurer celle de la guerre civile. L’échec du colloque de Poissy en 1561, cette tentative suprême de réconciliation entre les catholiques et les huguenots, fait tomber les dernières espérances. La guerre, la guerre seule tranchera désormais la question. Elle commence bientôt, cette guerre hideuse, cette guerre de trente ans qui va couvrir la France de sang et de ruines, anéantir la maison de Valois et faire surgir les actes d’héroïsme les plus sublimes et les cruautés les plus abjectes. Elle commence par le massacre de Vassy, en 1562 ; elle se poursuit par la Saint-Barthélémy, en 1572, et se termine au milieu des fureurs de la Ligue, en 1594.

À chaque étape, le crime grandit, le délire augmente ; à chaque étape aussi, la satire devient plus violente, plus effrénée.

Avant d’étudier cette seconde et sombre période de l’histoire de la satire au XVIe siècle, il convient d’examiner brièvement quel fut le rôle du clergé catholique pendant ces tristes années.

En 1560, la situation de la France était fort critique : sur