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LA COMTESSE HÉLÈNE POTOCKA.

Il écrivit en même temps à son fils une lettre affectueuse et remplie de promesses pour l’avenir. L’effet produit par ces deux missives fut très différent.

La comtesse Anna, partagée entre la surprise et l’émotion, sentit son cœur se serrer en les lisant ; elle n’y vit qu’une chose ; on lui-enlevait son fils une seconde fois. Depuis que François lui avait été rendu, elle lui avait consacré sa vie, le jeune comte, sans être régulièrement beau comme son père, avait une taille élégante, des manières distinguées, une physionomie intelligente et fine, avec une expression de douceur et de bonté qui lui gagnait tous les cœurs. Faudrait-il donner cet enfant bien-aimé pour fils à sa rivale ?

Tandis que la Grande-Chambellane, bouleversée par cette lecture, ne pouvait articuler une parole, le jeune comte, ébloui par la perspective que son père déroulait devant ses yeux, ému à la pensée d’une existence nouvelle et d’une liberté inconnue, après laquelle il soupirait secrètement, ne cacha point le plaisir que lui causait ces lettres.

La Grande-Chambellane vit bien, par la joie qui rayonnait dans ses yeux, l’effet que lui produisait la proposition de son père. Elle dissimula de son mieux son propre chagrin, et après avoir laissé