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recevoir l’Évangile. La jalousie divisait les familles ; les disputes, les meurtres n’étaient pas rares. Des ministres protestants, des hommes perdus de mœurs, avaient traversé la contrée, diffamant les robes-noires. Le missionnaire put néanmoins faire, chaque soir, une instruction. Il baptisa même quelques enfants, ainsi qu’un vieillard, qui mourut deux jours après, et fut enterré avec les cérémonies en usage dans l’Église catholique.

Au bout d’une semaine, le P. De Smet se sépara des Assiniboins. Avec ses trois compagnons, il poursuivit sa route à travers une forêt de cyprès. Les branches étaient si serrées, qu’à chaque pas elles accrochaient les vêtements, déchiraient les mains et le visage. Ce fut, pour notre voyageur, l’occasion d’une nouvelle aventure.

« J’avais, dit-il, à passer sous un arbre incliné au-dessus du sentier. Une de ses branches, brisée à l’extrémité, présentait un crochet menaçant. Pour l’éviter, je m’étendis sur le cou de mon cheval. Vaine précaution. Je fus saisi par le col de mon habit, et, mon cheval continuant sa course, je restai suspendu, me débattant comme un poisson pris à l’hameçon. Les lambeaux de ma soutane, agités par le vent, témoigneront longtemps de mon passage par la forêt. Un chapeau troué, un œil poché, deux fortes égratignures à la joue, m’auraient, dans un pays civilisé, fait prendre pour un bretteur sortant de la Forêt-Noire, plutôt que pour un missionnaire ».[1] Après avoir plusieurs semaines voyagé dans les Montagnes, la caravane descendit dans la vaste plaine qui s’étend entre le Saskatchewan et le Haut-Missouri. C’est

  1. Lettre à Mgr Hughes. — Fort des Montagnes, 5 octobre 1845.