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Ils deviennent furieux pour avoir plus d’alcool. En obtiennent-ils, ils ne cessent de crier : Encore ! encore ! jusqu’à ce que, brûlés par « l’eau de feu », ils tombent ivres morts. Ils n’ont pas plus tôt repris leurs sens, que leur première et seule exclamation est toujours : Whiskey ! whiskey ! whiskey ! comme si la vie et la mort en dépendaient.

» Pendant qu’ils sont ivres, la passion les entraîne aux pires excès. Ce sont d’abord des chants joyeux, auxquels succèdent des cris et des hurlements. Les disputes et les querelles suivent de près. Viennent les coups de couteau» de lance, de casse-tête ; et le meurtre enfin couronne ces abominables orgies. Déjà on compte un grand nombre de morts ; d’autres sont horriblement mutilés. En présence d’un sauvage ivre, point de sécurité. Plusieurs fois ma vie a été dans le plus grand danger ».[1]

Le gouvernement, il est vrai, interdisait par des lois sévères l’entrée des liqueurs sur le territoire indien ; mais aucun agent ne semblait chargé de faire exécuter ces lois : l’eau-de-vie arrivait par cargaisons.[2]

Indigné, le P. De Smet s’arme un jour d’une hache, et, d’un coup vigoureux, défonce un tonneau qu’allaient se partager les Indiens. Dans une lettre énergique, il dénonce à Washington un abus aussi criminel qu’illégal.

Sans doute, on fit peu de cas, en haut lieu, des doléances d’un jésuite. Peut-être même ne déplaisait-il pas à certains Yankees de voir une race détestée travailler elle-même à sa propre destruction. Les Blancs purent continuer en paix leur odieux trafic.

  1. Lettre à Fr. De Smet. — 29 oct. 1839.
  2. On lira avec intérêt le journal du P. De Smet, du 10 mai au 15 oct. 1839. Chittenden et Richardson, p. 171-178.