À peine arrivé, une fièvre ardente le saisit. Pendant huit jours, son état ne fit que s’aggraver.
« La veille de notre départ pour le Havre, écrit un de ses compagnons, Arnold Damen, il était si mal que deux des plus célèbres médecins de la capitale lui déclarèrent que, s’il s’embarquait, il serait mort dans trois jours. Terrible décision pour nous, qui nous voyions réduits à faire seuls un voyage de plus de 2 000 lieues, et pour ce bon Père, qui brûlait du désir de retourner en Amérique. Les médecins furent une seconde fois consultés par le P. Provincial. Leur réponse fut négative. Ils permirent seulement que le P. De Smet nous accompagnât jusqu’au Havre, Il fit le voyage, regrettant toujours de ne pouvoir regagner sa mission, mais décidé à retourner en Belgique.
» Alors la pensée nous vint de faire violence au ciel et d’implorer l’assistance de sainte Philomène. Le P. De Smet et le P. Gleizal, prêtre français qui nous accompagnait, dirent à cette intention trois messes ; les autres allèrent à la sainte table. En outre, les Pères promirent neuf messes, et nous promîmes de faire également une neuvaine, si la sainte obtenait au malade la grâce de faire la traversée.
» Le jour du départ arrivé, nous étions sans espoir. Le Père vint nous conduire au navire ; il nous fit ses adieux, puis regagna la ville, tandis que nous sortions du bassin. Déjà nous atteignions la haute mer, lorsque tout à coup nous aperçûmes une petite barque qui se dirigeait vers nous. C’était le P. De Smet qui venait nous rejoindre. Le transport de joie que cette vue nous causa fit bientôt place à la crainte et à l’anxiété. Seul, le Père était tranquille. Sa confiance ne devait pas être trompée. Ce qu’il éprouva du mal de mer ne fut