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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

même substance[1], bien que se partageant individuellement en des milliers de corps. Il n’y a qu’une seule vie, bien qu’elle se répartisse à des milliers de natures diverses, et s’y détermine de mille manières. Enfin il n’y a qu’une seule âme intelligente[2], bien qu’elle semble disséminée à l’infini. Entre toutes ces parties différentes de l’univers, il en est, par exemple le souffle vital ou les objets purement matériels, qui sont insensibles, et qui restent mutuellement étrangères les unes aux autres, quoique d’ailleurs toutes ces choses soient également soumises au principe raisonnable qui les embrasse, et à la force de pesanteur qui les entraîne indistinctement vers un même centre. Mais le propre de notre intelligence[3], c’est de nous pousser à nous unir

  1. Une seule et même substance. C’est une théorie très-contestable ; et, aujourd’hui que l’étude de la nature a fait d’immenses progrès, il serait bien difficile de la soutenir encore. ? Une seule vie. Il n’est pas plus aisé de confondre la vie végétale avec la vie animale et la vie intellectuelle. Toutes ces généralités sont fort obscures ; mais elles étaient presque une nécessité pour le Stoïcisme, avec sa théorie, d’ailleurs très-vraie, de l’ordre universel des choses.
  2. Il n’y a qu’une seule âme intelligente. C’est le Panthéisme, dont l’École stoïcienne n’a pas su se défendre. Mais tous ces problèmes sont si ardus qu’on ne doit pas s’étonner que les Stoïciens, impuissants comme tant d’autres, n’aient pas su les résoudre.
  3. De notre intelligence. Le texte n’est pas aussi précis ; mais la fin