Page:Pensées de Marc-Aurèle, trad. Barthélemy-Saint-Hilaire.djvu/430

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
408
PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

choses indifférentes[1], et si nous nous montrons faciles à séduire, faciles à nous laisser prévenir, faciles à changer d’avis.

XI

Puisque ce ne sont pas les choses mêmes qui viennent à toi[2], quand elles te bouleversent par l’espérance ou par la crainte, c’est toi seul qui, en un certain sens, vas vers elles. Apaise donc et mets de côté le jugement que tu en portes ; et, comme les choses ne bougeront pas, on ne te verra, ni les rechercher, ni les fuir.

    notre étude et à notre admiration.

  1. Les choses indifférentes. Le texte dit précisément : « Les choses moyennes » ; d’après la formule du Stoïcisme, ce sont celles qui ne sont ni bonnes ni mauvaises. « Puisque tout, dit Sénèque, est bien ou mal, ou indifférent, nous appelons Indifférent tout ce qui peut arriver aussi bien à un méchant qu’à un homme vertueux, comme l’argent, la beauté, la noblesse. » Épître CXVII, à Lucilius.
  2. Puisque ce ne sont pas les choses qui viennent à toi. C’est une des maximes fondamentales du Stoïcisme ; et comme c’est là une vérité incontestable, l’homme doit surtout agir sur lui-même bien plutôt que d’essayer d’agir sur les choses. De là, cette surveillance perpétuelle sur soi-même et la domination exclusive de la raison, pour se prémunir autant que possible contre les surprises des sens et contre les faux plaisirs et les fausses douleurs. Voir plus haut un développement admirable de cette idée, liv. IV, § 3 et § 39 ; voir aussi liv. V, § 39, et liv. IX, § 15.