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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

nauté, à laquelle elle appartient ? Ne s’est-elle pas tellement absorbée et confondue dans cette misérable chair[1], qu’elle en subisse et en partage toutes les fluctuations ?

XXV

L’esclave qui fuit son maître[2] est un déserteur et un fugitif ; or notre maître, c’est la loi ; donc transgresser la loi, c’est fuir et déserter. Par la même raison, on a tort et l’on transgresse la loi quand on s’afflige, quand on s’emporte, quand on s’effraie pour une de ces choses passées, présentes ou futures, lesquelles sont réglées par Celui qui régit l’univers[3], par Celui qui est la loi même, répartissant à chacun ce qui lui revient. Ainsi, la crainte, la douleur, la colère[4], ce sont là autant de désertions.

    communauté. C’est-à-dire de l’ordre universel, dont chacun de nous fait partie.

  1. Dans cette misérable chair. Voir plus haut, liv. IX, § 41. Pour la pensée générale de ce paragraphe, voir plus haut, liv. VIII, § 34.
  2. L’esclave qui fuit son maître. La comparaison est peut être plus frappante qu’elle n’est juste. L’homme n’est pas, à vrai dire, l’esclave de la loi ; il en est le serviteur, puisqu’il s’y associe par sa raison, et qu’en l’exécutant il se fait gloire d’y obéir et de l’approuver.
  3. Par Celui qui régit l’univers. C’est-à-dire Dieu, avec sa toute-puissance et sa miséricorde infinie.
  4. La crainte, la douleur, la colère. Ce sont des passions bien na-