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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

lamine[1], ni même qu’il ait brillé davantage par ses conversations dans les rues[2], points sur lesquels on pourrait insister, si tout cela était parfaitement exact[3]. Ce qu’il faut savoir avant tout, c’est ce qu’était réellement l’âme de Socrate[4], s’il pouvait concentrer tout son bonheur à être juste envers les hommes et pieux envers les Dieux, s’il ne s’abandonnait pas plus que de raison à sa colère contre le vice, ou s’il ne condescendait pas un peu trop complaisamment à l’ignorance des hommes, s’il ne recevait pas avec assez de résignation[5] la part qui lui était faite dans le destin universel, s’il ne la regardait pas comme intolérable, et enfin s’il ne laissait pas quelquefois succomber l’esprit aux passions de la chair[6].

  1. L’homme de Salamine. Cet homme s’appelait Léon ; et Socrate, en refusant de l’arrêter, s’exposait à la mort si la tyrannie des Trente n’eût été renversée bientôt après, Apologie, p. 100.
  2. Par ses conversations dans les rues. Le texte n’est pas tout à fait aussi précis ; mais le sens ne peut être que celui-là.
  3. Si tout cela était parfaitement exact. Il n’y a guère lieu de douter de faits attestés par des témoins tels que Xénophon et Platon, sans parler de la tradition, qui a toujours été d’accord avec eux.
  4. Ce qu’était réellement l’âme de Socrate. C’est là appliquer à Socrate lui-même la méthode qu’il appliquait aux autres, et qu’il leur a toujours recommandée.
  5. Avec assez de résignation. Personne n’a été plus résigné que Socrate ; et le Phédon tout entier est là pour le prouver, aussi bien que le Criton, sans parler de sa doctrine sur la bonté toute puissante et la providence de Dieu.
  6. Succomber l’esprit aux passions de la chair. Il serait