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LIVRE VII, § LXVI.

LXV

Prends garde à ne pas éprouver, même envers des gens inhumains, les sentiments que trop souvent les hommes montrent pour des hommes[1].

LXVI

Comment savoir si l’âme de Télaugès[2] était supérieure à celle de Socrate ? Pour résoudre cette question, il ne suffit pas[3] que Socrate soit mort plus glorieusement que Télaugès, qu’il ait combattu les sophistes avec plus d’énergie, qu’il ait veillé plus courageusement au milieu des nuits glaciales du camp, qu’il ait résisté avec plus de magnanimité à l’ordre d’arrêter l’homme de Sa-

  1. Des gens inhumains… les hommes… pour des hommes. L’opposition est encore plus marquée, s’il est possible, dans le texte que dans la traduction. C’est un cliquetis de mots analogues que la langue grecque rend ici mieux que la nôtre.
  2. Télaugès. Il s’agit sans doute du fils de Pythagore, et son nom aura pu servir d’exemple à Marc-Aurèle aussi bien que tout autre nom. Voir Diogène de Laërte, Vie de Pythagore, liv. VIII, chap. I, p. 214, ligne 31, édit. Firmin-Didot.
  3. Il ne suffit pas. Il semble que c’est pousser l’exigence bien loin que de ne pas se trouver satisfait des principales actions de Socrate, où il a montré tant de courage et tant de vertus de tout genre. Socrate rappelle lui-même les faits auxquels Marc-Aurèle fait ici allusion, dans son Apologie ; voir la traduction de M. V. Cousin, passim et surtout pp. 91, 99 et 100.