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LIVRE IV, § XVIII.

de singe[1], pour peu que tu t’en tiennes aux principes et au culte de la raison.

XVII

Ne te conduis pas comme si tu devais vivre des millions d’années. L’inévitable dette est suspendue sur toi. Pendant que tu vis, pendant que tu le peux encore, deviens homme de bien.

XVIII

Que de temps on pourrait se ménager en ne regardant point à ce qu’a dit le voisin[2], à ce qu’il a fait, à ce qu’il a pensé, et en ne songeant qu’à ce qu’on fait soi-même, afin de rendre toutes ses actions justes et saintes ! Oui, à l’exemple de l’homme de bien[3], il faut ne point plonger ses re-

  1. De bête fauve ou de singe. Un empereur était plus que tout autre exposé à ces fluctuations et à ces retours de la popularité. Marc-Aurèle ne paraît pas s’être soucié beaucoup ni des unes ni des autres. Un ferme ami de la raison n’a jamais à s’inquiéter outre mesure de ces passions mobiles de la foule, quoiqu’elles puissent lui coûter cher, comme à Socrate.
  2. Le voisin. Ou le prochain, si l’on veut. Le mot grec est le même dont se sert le texte de l’Évangile pour exprimer cette dernière pensée.
  3. À l’exemple de l’homme de bien. Il y a ici quelque altération dans le texte ; et plusieurs éditeurs ont proposé une heureuse variante, qui n’exige qu’un très-léger changement matériel. Il faudrait, selon eux, introduire le nom d’Agathon, le poëte contemporain et ami de Socrate et de Platon. Alors on traduirait : « Comme le dit Agathon », au lieu de :