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PENSÉES DE MARC-AURÈLE.

vue sous lequel il voudrait te les faire voir. Pour toi, ne les considère que dans leur réalité.

XII

Voici deux choses auxquelles il faut que tu sois incessamment tout prêt : la première, de ne faire absolument que ce que te recommande, dans l’intérêt de tes semblables, la raison, qui doit te régir souverainement et te dicter ses lois ; la seconde, de changer d’avis[1] si tu viens à rencontrer quelqu’un qui t’éclaire, et qui te fasse renoncer à ta première pensée. Il est évident d’ailleurs que ton changement doit toujours venir de cette conviction profonde que la chose est juste ou qu’elle est d’utilité générale ; car ce ne sont jamais que des motifs analogues et aussi sérieux qui doivent te faire varier, et non pas cette considération qu’il peut y avoir pour toi dans l’idée nouvelle que tu adoptes ou du plaisir, ou de la gloire.

  1. La raison, qui doit te régir souverainement… changer d’avis. Deux préceptes excellents, d’une application très-difficile pour tout le monde, mais surtout pour un homme revêtu de la toute-puissance, qui ne permet guère d’être docile à la raison, ni surtout de paraître avoir jamais eu tort.