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La vraie force est l’exagération de la souplesse. L’artiste doit contenir un saltimbanque.

Il n’y a de bête, en fait d’art, que : 1o le gouvernement, 2o les directeurs de théâtre, 3o les éditeurs, 4o les rédacteurs en chef des journaux, 5o les critiques autorisés ; enfin tout ce qui détient le pouvoir, parce que le pouvoir est essentiellement stupide. Depuis que la terre tourne, le Bien et le Beau ont été en dehors de lui.

Quand on écrit bien, on a contre soi deux ennemis : 1o le public, parce que le style le contraint à penser, l’oblige à un travail ; 2o le gouvernement, parce qu’il sent en nous une force, et que le pouvoir n’aime pas un autre pouvoir. Les gouvernements ont beau changer, monarchie, empire ou république, peu importe ! l’esthétique ne change pas. De par la vertu de leur place, les agents, administrateurs et magistrats, ont le monopole du goût.

La réalité ne se plie point à l’idéal, mais le confirme.