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VOLTAIRE PHILOSOPHE

La soumission pourtant ne suffit pas. Interrogé par un théologal sur la manière dont il adore Dieu : « Je me garde bien, répond le bon vieillard Dondindac, de lui rien demander » ; mais il a dit d’abord : « Je le remercie des biens dont je jouis et même des maux dans lesquels il m’éprouve » (Dict. phil., Dieu, XXVIII, 398). Tel est le culte particulier et intime que nous devons à l’Être suprême.

Du reste, Voltaire ne répudie point les cérémonies publiques. Seulement, ne pouvons-nous les rendre moins indignes de Dieu ? Il voudrait par exemple que, proscrivant du culte chrétien le « barbare galimatias » attribué à David, on louât la puissance et la bonté divine sur le mode d’Orphée, de Pindare, de Pope ; qu’on ne prononçât plus de ces sermons où la métaphysique la moins intelligible alterne avec la satire, et qu’on y substituât des exhortations morales[1]. Mais, s’il reproche aux catholiques ce que leurs cérémonies lui paraissent avoir de ridicule, d’absurde ou de malséant, il trouve bon que le peuple s’assemble parfois dans les temples pour remercier Dieu de ses dons, qu’un citoyen, nommé vieillard ou prêre, y récite de publiques actions de grâces[2].

Pourtant le meilleur culte que nous puissions rendre à l’Être suprême, c’est de pratiquer la vertu. On connaît les vers de Boileau dans sa satire sur l’Amour de Dieu :

Qui fait exactement ce que ma loi commande
A pour moi, dit ce Dieu, l’amour que je demande.

    encore Les Oreilles du comte de Chesterfield, XXXIV, 437, et l’article Dieu du Dictionnaire philosophique, XXVIII, 395.

  1. Dieu et les Hommes, XLVI, 275 sqq.
  2. Dict. phil., Dieu, XXVIII, 390.