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VOLTAIRE PHILOSOPHE

cations, que je ferai descendre imperceptiblement par cette espèce de long bâton à plusieurs nœuds que vous voyez attaché à cette boule et qui se termine en pointe dans un creux. J’adapterai au haut de ce bâton un tuyau par lequel je ferai entrer l’air au moyen d’une soupape qui pourra jouer sans cesse ; et bientôt vous verrez cette fabrique se remuer d’elle-même. À l’égard de tous ces autres morceaux informes qui vous paraissent comme des restes d’un bois pourri et qui semblent être sans utilité comme sans force et sans grâce, je n’aurai qu’à parler, et ils seront mis en mouvement par des espèces de cordes d’une structure inconcevable. Je placerai au milieu de ces cordes une infinité de canaux remplis d’une liqueur qui, en passant par des tamis, se changera en plusieurs liqueurs différentes et coulera dans toute la machine vingt fois par heure. Le tout sera recouvert d’une étoffe blanche, moelleuse et fine… Cette machine sera un si étonnant laboratoire de chimie, un si profond ouvrage de mécanique et d’hydraulique, que ceux qui l’auront étudié ne pourront jamais le comprendre… Mais ce qui vous surprendra davantage, c’est que, cet automate s’étant approché d’une figure à peu près semblable, il s’en formera une troisième figure. Ces machines auront des idées, elles raisonneront, elles parleront comme vous, elles pourront mesurer le ciel et la terre », etc. — « Si la chose est ainsi, répond Madétès, j’avouerai que vous en savez plus qu’Épicure et que tous les philosophes de la Grèce. — Hé bien, tout ce que je vous ai promis est fait. Vous êtes cette machine… Jugez après cela si un être intelligent n’a pas formé le monde » (La Défense de mon Oncle, XLIII, 383).