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VOLTAIRE PHILOSOPHE

classes pauvres et surtout des paysans, le régime de l’impôt. Nous examinerons successivement ces divers points.

Quant à l’hygiène, rappelons d’abord les campagnes de Voltaire en faveur de l’inoculation ; il la recommanda chez nous le premier, et nul autre ne combattit avec autant de zèle et de persévérance les préjugés dont elle ne triompha que tardivement[1].

Tout est encore à faire, de son temps, pour l’assainissement des villes. Les inconvénients des hôpitaux en surpassent les avantages. On y voit entassés sur le même lit quatre ou cinq misérables qui se communiquent leurs maladies l’un à l’autre ; et l’atmosphère imprégnée de miasmes n’empoisonne pas seulement les malades, mais répand la mort dans toutes les rues avoisinantes. Il faut construire des hôpitaux où l’on puisse guérir ; il faut, à Paris, remplacer l’Hôtel-Dieu par plusieurs bâtiments, situés en des quartiers divers, où nos malades trouveront assez d’espace et respireront un air salubre[2].

Mais que dire des inhumations ? « Vous entrez dans la gothique cathédrale de Paris ; vous y marchez sur de vilaines pierres mal jointes, qui ne sont point au niveau ; on les a levées mille fois pour jeter sous elles des caisses de cadavres. Passez par le charnier qu’on appelle Saint-Innocent ; c’est un vaste enclos consacré à la peste : les pauvres, qui meurent souvent de maladies contagieuses, y sont enterrés pêle-mêle ; les chiens y viennent quelquefois ronger les ossements ; une vapeur épaisse, cadavéreuse, infectée, s’en

  1. Lettres philosophiques, XXXVII, 162 sqq. ; Omer de Fleury, etc., XLI, 16 sqq. ; Lettre à Tronchin, 18 avr. 1756, etc.
  2. Dict. phil., Charité, XXVIII, 13 sqq.