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VOLTAIRE PHILOSOPHE

temps qui s’évertuaient à refaire le monde. Je laisse, dit-il dans la satire des Cabales,

Je laisse au roi, mon maître, en pauvre citoyen,
Le soin de son royaume, où je ne prétends rien.
Assez de grands esprits, dans leur troisième étage,
N’ayant pu gouverner leur femme et leur ménage,
Se sont mis par plaisir à régir l’univers[1].

(XIV, 258.)


Dans l’article Économie du Dictionnaire philosophique, il se défend de déclamer à la façon de « ces politiques qui gouvernent un État du fond de leur cabinet par des brochures » (XXVIII, 504). Dans l’article États, Gouvernements : « Je n’ai connu jusqu’à présent personne, déclare-t-il, qui n’ait gouverné quelque État. Je ne parle pas de MM. les ministres, qui gouvernent, en effet, les uns deux ou trois ans, les autres six semaines ; je parle de tous les autres hommes, qui, à souper ou dans leur cabinet, étalent leur système de gouvernement » (XXIX, 252)[2]. Contre le plus illustre de ces « législateurs », Jean-Jacques, les allusions ne lui suffisent pas : dans un article intitulé Pierre le Grand et Jean-Jacques Rousseau, il attaque directement l’auteur du Contrat social[3].

  1. Voltaire ajoute en note : « L’Europe est pleine de gens qui, ayant perdu leur fortune, veulent faire celle de leur patrie ou de quelque État voisin. Ils présentent aux ministres des mémoires qui rétabliront les affaires publiques en peu de temps ; et, en attendant, ils demandent une aumône, qu’on leur refuse », etc.
  2. Cf. Lettre à Chauvelin, 18 sept. 1763 : « Avez-vous entendu parler d’un sénéchal de Forcalquier qui en mourant a fait un legs au roi de l’Art de gouverner en trois volumes in-4o ? C’est bien le plus ennuyeux sénéchal que vous ayez jamais vu. Je suis las de tous ces gens qui gouvernent les États du fond de leur grenier. »
  3. « Je voudrais en général que, lorsqu’on juge les nations