Page:Pellissier - Voltaire philosophe, 1908.djvu/185

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
170
VOLTAIRE PHILOSOPHE

grands. « Le malheur des athées de cabinet est de faire des athées de cour » (Dict. phil., Dieu, XXVIII, 392).

On s’explique par là pourquoi Voltaire combat les philosophes qui, de son temps, professaient et enseignaient l’athéisme. C’est avec Helvétius et surtout avec d’Holbach qu’il eut affaire. Et, contre le Dieu des prêtres, il leur donne raison : aussi bien l’un et l’autre ne font sur ce point que répéter ce que lui-même avait déjà dit. Mais on peut avoir raison contre le Dieu des prêtres sans avoir raison contre celui des théistes. « Parce qu’on a chassé les Jésuites, faut-il chasser Dieu ? Au contraire, il faut l’en aimer davantage » (Dict. phil., Dieu, XXVIII, 394). Réfutant Helvétius et d’Holbach, Voltaire reste d’accord avec lui-même. Il distingue toujours la superstition de la religion ; et c’est tantôt pour attaquer la superstition sans que la religion puisse en souffrir, tantôt pour défendre la religion sans que la superstition puisse en profiter.

Comme Voltaire fait prévaloir la morale sur la métaphysique, nous devons penser que, se déterminant par des motifs tirés de l’intérêt social, il n’exprime pas toujours en métaphysique sa véritable opinion, je veux dire, si l’on peut ainsi parler, son opinion proprement intellectuelle.

Nous avons vu plus haut comme quoi il hésite et se contredit sur la question de Dieu, non pas sur l’Être nécessaire, mais sur le Dieu qui punit les méchants et récompense les bons. Lorsqu’il rejette les peines et les récompenses futures, par exemple dans son Traité de Métaphysique, qui ne fut pas écrit pour l’impression, alors il prétend qu’on n’a pas besoin d’y croire pour se bien conduire. Ainsi, dans le sixième