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VOLTAIRE PHILOSOPHE

point. Je t’annonce un Dieu tyran qui m’a fait pour être ton tyran ; je suis son bien-aimé ; il tourmentera pendant toute l’éternité des millions de ses créatures qu’il déteste, pour me réjouir ; je serai ton maître dans ce monde, et je rirai de tes supplices dans l’autre » (Dict. phil., Impie, XXX, 333). Cet impie-là ne mérite ni pitié, ni pardon. Et comment ne pas lui préférer un athée. L’athée manque de sagesse ; le fanatique est une bête féroce[1].

Cependant l’athéisme peut faire beaucoup de mal. Mieux vaut encore être asservi à des superstitions grossières, si elles ne nous rendent pas inhumains, que de vivre sans croyance religieuse[2]. D’ailleurs, « un athée qui serait raisonneur, violent et puissant, serait un fléau aussi funeste qu’un superstitieux sanguinaire » (Traité sur la Tolérance, XLI, 352)[3].

  1. Cf. Ode sur le Fanalisme :

    Je sentirais quelque indulgence
    Pour un aveugle audacieux
    Qui nierait l’utile existence
    De l’astre qui brille à mes yeux.
    Ignorer ton être suprême,
    Grand Dieu, c’est un moindre blasphème
    Et moins digne de ton courroux
    Que de te croire impitoyable,
    De nos malheurs insatiable,
    Jaloux, injuste comme nous.

    Lorsqu’un dévot atrabilaire,
    Nourri de superstition,
    A, par cette affreuse chimère,
    Corrompu sa religion,
    Le voilà stupide et farouche ;
    Le fiel découle de sa bouche,
    Le Fanatisme arme son bras ;
    Et, dans sa piété profonde,
    Sa rage immolerait le monde
    À son Dieu, qu’il ne connaît pas.

    (XI, 424.)
  2. Traité sur la Tolérance, XLI, 349.
  3. Cf. Homélie sur l’Athéisme : « L’athéisme peut causer quel-