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RELIGION

de la confondre avec celle des faux chrétiens[1].

La religion protestante se rapproche plus que la catholique du véritable christianisme. Aussi lui marque-t-il souvent quelque préférence. L’auteur d’une dissertation critique sur la Henriade[2] avait écrit ces lignes : « … Un vieillard catholique qui prédit deux choses : l’une, que notre religion[3] sera bientôt détruite ; l’autre, que Henri IV se fera papiste dans l’occasion. De ces deux prédictions, la première me semble difficile à accomplir ; au contraire, il y a plus d’apparence que le papisme sera à sa fin plus tôt que le protestantisme. » Voltaire met en marge de son exemplaire : « Je le souhaite de tout mon cœur, et ni moi ni mon ouvrage ne s’y opposent » (Réponse à la critique de la Henriade, X, 496). Il fait dire à milord Cornsbury : « Notre Église anglicane est… moins absurde que la romaine ; j’entends que nos charlatans ne nous empoisonnent qu’avec cinq ou six drogues, au lieu que les montebanks[4] papistes

    donner le mal » (Disc. préliminaire sur Alzire, IV, 155). — À la fin de la pièce, Gusman dit à Zamore :

    Des dieux que nous servons connais la différence :
    Les tiens t’ont commandé le meurtre et la vengeance,
    Et le mien, quand ton bras vient de m’assassiner,
    M’ordonne de te plaindre et de te pardonner.


    Et Zamore ne se convertit pas, car, dit Voltaire dans une note, « une conversion subite serait ridicule en de telles circonstances », mais il répond à Gusman :

    Ah ! la loi qui t’oblige à cet effort suprême,
    Je commence à le croire, est la loi d’un Dieu même.

    (IV, 226.)

  1. Remarques sur le Christianisme dévoilé, L, 536 sqq.
  2. Cette dissertation se trouve à la suite du poème dans l’édition de 1728, La Haye.
  3. C’est un anglican qui parle.
  4. Saltimbanques.