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VOLTAIRE PHILOSOPHE

raconte qu’un Espagnol, don Pablo d’Olivarès, coupable de posséder dans sa bibliothèque les œuvres des philosophes français, fut, malgré ses vertus et ses services, condamné au gibet, puis, par commutation, aux verges publiques et à la prison perpétuelle. « J’ai vu encore en Écosse, dit Voltaire[1], des restes de l’ancien fanatisme qui avait changé si longtemps les hommes en bêtes carnassières. Un des principaux citoyens d’Inverness, presbytérien rigide…, ayant envoyé son fils unique faire ses études à Oxford, affligé de le voir à son retour dans les principes de l’Église anglicane, et sachant qu’il avait signé les trente-neuf articles, s’emporta contre lui avec tant de violence qu’à la fin de la querelle il lui donna un coup de couteau dont l’enfant mourut en peu de minutes entre les bras de sa mère » (L, 508). Et voici maintenant une autre histoire qui se passa non loin de Ferney, à Saint-Claude : « Il y a quelques années que deux jeunes gens furent accusés d’être sorciers. Ils furent absous je ne sais comment par le juge. Leur père, qui était dévot et que son confesseur avait persuadé du prétendu crime de ses enfants, mit le feu dans la grange auprès de laquelle ils couchaient, et les brûla tous deux pour réparer auprès de Dieu l’injustice du juge qui les avait absous » (Lettre à Damilaville, 7 nov. 1764).

Mais tenons-nous-en aux persécutions contre les protestants de France. Quand le duc d’Orléans devint Régent, ils se crurent permis de tenir leurs assemblées religieuses en prévenant les magistrats. Ce prince,

  1. Dans son Histoire de l’établissement du Christianisme, attribuée à un auteur anglais.