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VOLTAIRE PHILOSOPHE

cimetière Saint-Médard, ils continuent leurs exploits en tenant des assemblées nocturnes où le fanatisme allie l’impudeur à la cruauté[1]. Telles sont les superstitions dont l’Église nourrit ses fidèles. Si l’on en croit Montesquieu, les Scythes crevaient les yeux à certains esclaves pour les rendre plus dociles. Ainsi fait l’Église catholique, et presque tout le monde est aveugle dans les pays qui subissent son joug. À peine si les Français du xviiie siècle commencent d’ouvrir un œil[2].

Le catholicisme ne se contente pas d’opprimer les intelligences et les consciences, il veut encore dominer sur la société civile.

D’abord, il fait prévaloir en maints points les institutions de l’Église sur celles de l’État : par exemple dans les lois qui régissent le mariage, dans le châtiment du sacrilège, dans le chômage des fêtes, dans les jeûnes.

Le mariage, encore à l’époque de Voltaire, n’avait, aucune valeur légale sans la consécration ecclésiastique ; c’était confondre le sacrement, qui octroie des grâces particulières, et le contrat, qui produit tous les effets civils[3]. D’autre part, comme l’Église tenait l’union conjugale pour indissoluble, la loi des pays catholiques, subordonnée au droit canon, n’admettait

  1. Cf. Lettre au marquis Albergati, 23 déc. 1760 : « Vous ignorez peut-être, monsieur, ce que c’est qu’un convulsionnaire : c’est un de ces énergumènes de la lie du peuple qui, pour prouver qu’une certaine bulle d’un pape est erronée, vont faire des miracles de grenier en grenier, rôtissant des petites filles sans leur faire de mal, leur donnant des coups de bûche et de fouet pour l’amour de Dieu. » — Cf. encore, Septième Discours sur l’Homme, XII, 97 ; Dict. phil., Convulsions, XXVIII, 222 sqq.
  2. Dict. phil., Lettres, XXXI, 8.
  3. Dict. phil., Droit canonique, XXVIII, 487 ; Mariage, XXXI, 128.