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VOLTAIRE PHILOSOPHE

L’éducation devrait éveiller l’esprit, former le jugement, développer le sens critique ; ce que veulent au contraire les ministres du catholicisme, c’est aveugler les hommes et fausser leur entendement. « Un fakir élève un enfant qui promet beaucoup ; il emploie cinq ou six années à lui enfoncer dans la tête que le dieu Fo apparut aux hommes en éléphant blanc, et il persuade l’enfant qu’il sera fouetté après sa mort pendant cinq cent mille années s’il ne croit pas ces métamorphoses » (Dict. phil., Esprit, XXIX. 242). Voilà comment l’Église a, depuis des siècles, perpétué sa puissance.

Il n’est pas de sottise que les prêtres ne prétendent inculquer à un peuple abruti par leurs soins. Dans les livres de nos christicoles sur les vies des saints, on lit que la chaussette de saint Honoré ressuscita un mort ; que saint Gracilien, par le mérite de son oraison, déplaça une montagne ; que, saint Pantaléon ayant eu la tête tranchée, du lait jaillit de son col ; que, le jour où Rome canonisa saint Antoine de Padoue, toutes les cloches de Lisbonne se mirent d’elles-mêmes à sonner ; que saint Paulin fit tomber par terre, en touchant des reliques, un possédé qui se promenait, comme une mouche, à la voûte d’une église ; que saint Romain, jusqu’alors bègue, parla, dès qu’on lui eut arraché la langue, avec la plus grande volubilité[1]. Encore du temps de Voltaire ont lieu parfois des prodiges tout aussi étonnants : à

    Lecture, un anathème lancé par le muphti du saint Empire ottoman contre l’infernale découverte de l’imprimerie, qui va sans doute dissiper l’ignorance, heureuse sauvegarde des Etats bien policés (XLII, 115 sqq.).

  1. Extrait des Sentiments de Jean Meslier, XL, 424 sqq. ; Fragment de l’Histoire générale, XLVII, 536 sqq.