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II
AVANT-PROPOS

Il ne nous a pas coûté de signaler chemin faisant dans Voltaire ce qu’on appelle les lacunes de son intelligence. Mais nous préférerions qu’on les appelât autrement. En réalité, son intelligence nous paraît avoir bien peu de lacunes. Disons plutôt qu’il manqua d’imagination. Il ne possédait ni la faculté métaphysique, ni l’invention scientifique, ni le sens mystique. Et c’est d’ailleurs pour cela qu’il n’édifia aucun système illusoire, qu’il restreignit la science dans les limites de l’observation et de l’expérimentation, qu’il bannit tout surnaturel en réduisant la religion à la morale.

Nous voudrions bien que les ennemis de Voltaire — car il en a toujours — reconnussent eux-mêmes notre équité. Du moins, nous osons espérer qu’on ne nous accusera pas de prévention, si, dans les principaux livres ou essais dernièrement publiés sur lui, nous relevons en passant de nombreuses erreurs, soit inspirées par la malveillance, soit provenant d’une lecture inattentive ou incomplète[1].

Nous avons lu avec soin son œuvre entière. Ce n’est pas un grand mérite. Et ce fut d’ailleurs pour

  1. Ai-je besoin de signaler ici, comme ce qu’on a écrit sur Voltaire de plus impartial et de plus juste, le récent livre de M. G. Lanson paru dans la collection des Grands écrivains français, où lui-même corrige en bien des points son chapitre peu bienveillant de l’Histoire de la Littérature française ?