trouvent dans l’assonance un moyen d’enrichir la langue poétique, de la rendre plus apte à traduire la vague et mobile intimité de l’âme humaine ? Enfin les novateurs répudient une précision sèche et catégorique, Verlaine disait :
Il faut aussi que tu n’ailles point
Choisir tes mots sans quelque méprise[1].
Un pareil précepte est, certes, très dangereux. Mais le
changement qui se fait dans la conception même
de la poésie explique bien qu’on recherche une
langue assez flottante pour rendre ce que le sentiment peut avoir d’indéfini, de voilé, de fugitif. Si,
chez tels jeunes poètes qui écrivent improprement,
cette impropriété tient à l’ignorance, les plus artistes
suivent eux-mêmes la recommandation de Verlaine.
Nous ne pouvons noter ici les nombreux tours
par lesquels ils donnent souvent à leurs vers un
charme subtil d’imprécision. Indiquons-en au moins
un, qui ne leur est pas particulier, mais dont ils se
servent beaucoup plus fréquemment que les poètes
antérieurs. C’est la substitution du terme abstrait
au terme concret. Dans les vers suivants de M. Henri
de Régnier, par exemple :
.... La forêt résonnante où se dresse
La multiplicité verticale des troncs[2].
Ou encore :
<poem style="margin-left:4em; font-size:90%">
Les lointains sont baignés de brumes violettes Où s’enfonce et se perd la blancheur des chemins[3].