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rue, son chapeau sur la tête, il redevient un homme du commun. Celui que l’idée accapare au pomt de lui faire oublier la vie, qui n’est ni époux, ni père, ni homme du monde, est d’essence tout autre. C’est celui-là qui est capable de penser toujours ; il ou¬ bliera de mander, l’idée le poursuivra la nuit dans ses rêvés ; la nature l’a marqué comme un esprit d’élite. 11 n’est pas sûr que l’humanité lui reconnaisse du génie ; il faudrait pour cela la réunion de bien d’autres éléments. On admet que les découvertes sont souvent l’effet du hasard, cela veut dire qu’elles comportent une réunion de circonstances dont quelques-unes sont fortuites.

Le génie est un fait psychologique, ce n’est pas nécessairement un fait social. Autrement dit, il n’est pas indispensable pour qu’il y ait génie qu’il y ait pro¬ duction géniale ; on peut très bien concevoir un génie qui ne produise pas. Le monde ne connaît que les œuvres, le génie improductif ne sera donc pas reconnu, mais il n’en existera pas moins. Il suit de là que le nombre des hommes de génie est plus grand qu’on ne pense ; on n’en connaît qu’une petite partie, ceux qui produisent et qui en même temps ont le bonheur de faire accepter leurs productions comme géniales. Stirner, le prédécesseur de Nietzche, vécut pauvre et méconnu ; il exposait dans les brasseries allemandes sa conception de l’individualisme ; on se moquait de lui.

Le plus grand nombre des intelligences est étouffé dans l’œuf par les circonstances, dans une société qui est encore bien loin de comprendre la nécessité qu’il y a pour son mieux être à mettre en valeur les intelligences supérieures.

Il est généralement admis que les obstacles ne