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me et si je puis éviter de les tuer, je le fais. Tiens, voilà justement Nénette ; je lui ai fait une fistule gastrique voilà déjà plusieurs armées ; elle va te la montrer : « Fais la belle, ma Nénette ». (Le chien se redresse et montre un petit sac de caoutchouc fixé à sa poitrine.)

Wagner. — Vous êtes, le patron et toi deux êtres exceptionnels. Certes, moi aussi je travaille : docteur ès sciences, docteur en médecine et je prépare maintenant le grand concours ; mais enfin, j’ai aussi ma vie : ma femme, mes enfants, tandis que vous deux ! Tu dois en rêver la nuit de ton laboratoire, hein ?

Delage. — Quelquefois. Bernard et moi nous sommes en effet très près par nos recherches. Tu te tromperais grandement cependant en le croyant confiné dans notre spécialité. Depuis les mathématiques jusqu’à la sociologie, il a embrassé tout le savoir humain, c’est l’Albert le Grand des temps modernes. J’essaie, moi aussi, de me donner des clartés de tout, mais je n’ai pas sa facilité, sa mémoire prodigieuse, sa rapidité d’assimilation. Ce qu’il fait en une heure, je le fais en trois, moi et péniblement.

Wagner. — Je parierais qu’il ne te reste plus de temps pour l’amour ?

Delage. — Il ne m’en reste pas pour le mariage. Le mariage, cela rétrécit la vie en l’encombrant de soucis matériels. Avec le célibat, noue réduisons à leur plus simple expression les préoccupations terre à terre ; au restaurant, je lis les journaux : la nuit, quand je ne dors pas, je lis des mémoires historiques.

Wagner. — En attendant, s’il n’y avait