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en russie communiste

mand, dit-il, me compromettrait. Je lui donne cinquante francs ; il oublie de me rendre la monnaie : enfin !

Il est huit heures du matin ; un soleil radieux illumine les rues de Bâle, les ouvrières par bandes vont au travail. J’ai oublié mes fatigues et me sens toute ragaillardie. Nous prenons un tramway, puis nous marchons à pied très longtemps hors de la ville.

Il fait une chaleur torride. Nous devons franchir une colline assez élevée, mon cœur bat avec violence ; tous les cinquante mètres je me couche à terre pour récupérer mon souffle. Par malheur nous nous égarons : mon compagnon ne retrouve pas le banc qu’il a répété dans ses précédents voyages ; il faut redescendre un peu. Enfin le banc est trouvé, on remonte et je vois avec joie les fameuses bornes de pierre grise.

On les franchit, mais deux paysans nous ont vus et, contretemps plus facheux encore, j’ai déchiré tous mes bas. Que pensera-t-on de cette femme bien vêtue qui, avec des chaussures élégantes, porte des bas déchirés ? Car le danger n’est pas fini quand on a passé la frontière : il y a des postes de douaniers sur une longueur de plusieurs kilomètres. Les villages aussi sont dangereux tout étranger est suspect, surtout une femme que l’on remarque davantage. Le jeune homme se retourne à chaque instant pour voir si nous sommes suivis ;