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mon voyage aventureux

ma poche mon passeport et les six mille marks qu’on m’a alloués pour le retour ; je sais qu’il n’aurait qu’un mot à dire pour qu’on m’empêche de partir. C’est pourquoi je me contente d’une échappatoire.

— Oh ! vous savez, Monsieur, je ne suis plus jeune et je considère ma mission de charme comme terminée.

Mais il ne veut pas me lâcher ; il me reproche l’argent que j’ai coûté aux Soviets et me dit que mon devoir est de rester en Russie. « Si les conditions sont mauvaises, fait-il, vous devez les supporter. »

J’ai à Paris mon cabinet de médecin, ma situation…

— Qu’est-ce que tout cela !

Mais on appelle le commissaire ; j’en profite pour m’esquiver sans demander mon reste.

En bas est l’autobus rouge où je monte pour la dernière fois le cœur ulcéré. Il pleut ; à la lumière grise qui tombe du ciel bas, Moscou m’apparaît infiniment triste. Les strophes d’un cantique qu’on me faisait chanter dans mon enfance me reviennent en mémoire :

« Tout n’est que vanité
« Mensonge, fragilité.

Vérité profonde ; tout n’est que vanité ; rien dans la vie ne vaut la peine, et plus pessimiste