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mon voyage aventureux

tions sont un peu vagues : remise de l’organisation de la production aux syndicats : de la répartition aux coopératives ; pas d’armée, pas de police, pas d’État. Qui centralisera les offres et les demandes de produits des diverses régions, ils négligent de le dire.

L’égoïsme humain, le désir du moindre effort, amèneraient rapidement la baisse du taux de la production : on ferait peu et on ferait mal. L’organisme directeur, nommé à l’élection, manquerait d’autorité.

L’un des deux camarades a conquis durant la guerre, les galons de capitaine. Il prétend que la Russie pourrait se défendre sans armée ; les paysans avec leurs fusils suffiraient à repousser l’invasion.

Je ne suis pas le moins du monde convaincue. Lorsque je vois dans la rue ces hommes qui se mouchent dans leurs doigts et baisent la terre au passage des icones, je ne puis me les représenter vivant en anarchie. Déjà, le socialisme qu’on a tenté d’instaurer a amené un chaos effroyable ; l’anarchie ne pourrait qu’aggraver encore la situation. L’absence de police déchaînerait les instincts criminels, les instincts sexuels ; on tuerait et on violenterait dans les rues, en plein jour. À la fin, pour se mettre en sécurité, les gens se tiendraient dans de petites agglomérations. La Russie se hérisserait de villages fortifiés et hostiles les uns