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en russie communiste

cloches qui ont été, me dit-on, prises à Wrangel. On les a apportées là pour les fondre, mais les ouvriers s’y refusent parce que ce sont des « choses du bon Dieu ». Que faire avec un pareil peuple ?

Je voudrais bien m’entretenir avec les ouvriers pour savoir ce qu’ils pensent du régime, mais cela ne m’est pas possible à cause de la langue. On ne m’a pas donné d’interprète. Il est d’ailleurs très difficile de se renseigner. Si on demande à un ouvrier ce qu’il reçoit, il commence par dire qu’il ne reçoit rien du tout. Lorsqu’on le presse, il finit par avouer qu’il reçoit ceci, cela, mais que ce n’est pas régulier.

Dans une tannerie, je suis réduite à visiter les ateliers vides, c’est lundi, on ne travaille pas. Les ouvriers sont en même temps paysans ; ils demeurent dans la banlieue de Moscou et on leur donne congé du samedi midi au mardi matin pour leur permettre de cultiver leur morceau de terre.

La fabrique de cigarettes est la mieux tenue de tous les établissements industriels que j’ai vus à Moscou. Les ateliers sont propres et très vastes. Des ventilateurs électriques envoient l’air frais et happent les poussières. Mille ouvriers, deux cents hommes et huit cents femmes travaillent dans cet établissement. Les vieilles femmes trient les feuilles de tabac, les jeunes mettent les cigarettes en boîte, les hommes surveillent les machines qui coupent les feuilles de tabac en fils très