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porte le pied. À dater de ce moment, le Créateur, toujours penché sur son œuvre, détache de la terre et rehausse le corps de l’animal. Il lui permet de marcher. C’est l’heure du quadrupède, mais du quadrupède monstrueux, difforme, bloc vivant à peine dégrossi à l’ébauchoire : l’heure du mastodonte, de l’hippopotame, de l’éléphant, du buffle, du rhinocéros, du dromadaire.

L’homme reste encore derrière la coulisse. Mais l’oiseau a déjà fait son apparition, si on peut appeler oiseau l’épiornis, façon d’autruche, grosse comme une girafe. On dirait partout les rêves pénibles et les spectres fantasques d’une nature encore plongée dans la nuit d’un premier sommeil. Mais, en rêvant, elle a trouvé le secret ; et de ce monde fœtus, en quelque sorte, elle tire le monde aujourd’hui en exercice.

Elle passe ensuite l’éponge sur sa première donnée comme sur une étude préparatoire, et, forte désormais de l’expérience acquise, elle procède magistralement à la mise en scène d’une création perfectionnée. Elle bouche le soupirail de la plupart des volcans, et refoule dans leur gorge le poison de leur haleine. Elle dépose deux gradins d’alluvion sur la première écorce pour isoler encore d’avantage l’atmosphère de la forge toujours flamboyante de Pluton. Dans ce profond soubassement du globe, elle emmagasine de nombreuses richesses minéralogiques, de nouvelles roches formées, celles-ci par agrégation, celles-là par réaction du granit sur le calcaire ; d’autres fondues mystérieusement au creuset