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prême de l’âme à la Divinité ; autres vies, autres chances de voluptés sacrées inaltérables, au dehors, au-dessus des caprices, des attentats des hommes ou des événements. Quiconque porte la vérité en lui a mis le pied sur le péristyle de l’éternité. Il repose en Dieu désormais ; tout bien de la terre pâlit à son regard devant ce bien souverain. Tant que ce bien souverain lui reste, il défie la destinée, il possède son âme en paix au sein même de l’indigence. Demandez plutôt à Newton ce que pèse n’importe quelle couronne d’empereur à côté de la découverte de l’attraction. Quand ce cri : J’ai trouvé put sortir enfin de sa poitrine dilatée par l’émotion, il tomba évanoui et foudroyé par l’extase.

Il y a plus. L’étude a quelque chose de sanctifiant qui change la douleur elle-même en vertu, comme la braise de l’encensoir change l’écorce flétrie de l’aloès en parfum. Heureux qui souffre, a dit l’Évangile ; l’homme bon, en effet, devient meilleur dans l’affliction ; l’épreuve le retrempe et l’incline à l’esprit de dévouement. Le livre, d’ailleurs, pour qui sait lire pieusement, est un muet consolateur, un prêtre à notre choix, qui verse sur la plaie de notre âme la sagesse écrite de tous les saints de la pensée, qui ont souffert comme nous et nous ont appris, par leur exemple, à souffrir. Je n’ai jamais eu de tristesse, disait un philosophe du siècle dernier, qu’un quart d’heure de lecture n’ait dissipée. Il disait trop, sans doute. Mais je comprends que Caton, au moment de fuir dans la morale éternelle le spectacle