Page:Pelletan - Le Monde marche.djvu/203

Cette page a été validée par deux contributeurs.

est en raison directe de la culture de l’intelligence. C’est le savant, c’est l’écrivain, c’est le médecin, c’est le fonctionnaire de la pensée, en un mot, qui atteint le plus souvent à l’extrême frontière de la vieillesse, comme si la pensée était l’huile de la lampe et l’essence même de l’existence.

Autre fait aussi concluant. La première compagnie d’assurance sur la vie établie en Angleterre, crut devoir prendre à son début la moyenne des deux derniers siècles pour base de calcul. Mais à l’application elle comprit bientôt que la civilisation avait reculé le délai de la mort, d’une génération à l’autre, et elle releva après coup le taux de la prime pour la mettre en équilibre avec cette augmentation de durée. Cette réponse pourrait suffire à la rigueur. Mais le progrès a encore plus d’ambition. Il donne à l’homme quelque chose de plus qu’un sursis d’existence.

Durer n’est pas vivre ; vivre c’est agir ; vivre davantage, c’est donc multiplier davantage son action dans un laps de temps donné. Le temps n’est que le champ d’action de la vie et non la vie elle-même. Il ne suffit pas d’agrandir le champ pour augmenter la vie, il faut encore, il faut surtout multiplier l’action dans la même mesure.

Certes le temps coule pour le rocher aussi bien que pour l’homme pensant. Mais comme les jours tombent morts les uns après les autres sur ce bloc insensible, sans y provoquer aucune modification, tous ces jours