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d’ailleurs il n’y avait plus une seule arme à feu dans la maison. Les récits des journaux, qu’on verra plus loin, et les propos du capitaine permettent d’affirmer qu’on lui avait dénoncé l’ambulance comme un nid de fédérés cachés, et que le prétexte du coup de fusil n’était qu’une entrée en matière. Cela est d’autant plus vraisemblable que les voisins ignoraient l’existence de l’ambulance, installée seulement depuis la veille, et dans une journée où l’on ne sortait guère de chez soi. Cette ambulance, poussée en une nuit, a dû éveiller les méfiances des dénonciateurs.

Quoi qu’il en soit, la troupe entre, le capitaine et le sous-lieutenant en tête. « On a tiré sur mes hommes, nous allons vous fusiller. — On n’a pas tiré, répond Faneau, il n’y a pas d’armes à feu ici, il n’y a que des blessés. — Vos prétendus blessés sont des insurgés. Où est le chef ? — C’est moi. » Le capitaine ajustait Faneau de son revolver. « Ne le tuez pas, criait un aide-major. — Rentrez, ou je commence par vous. » — Un coup de revolver partit, mais atteignit à peine la victime. Un soldat l’acheva d’un coup de fusil à bout portant. Un flot de sang jaillit de la plaie. La mort fut instantanée.

Ainsi périt, tout jeune encore, au milieu de ses malades, un médecin de grand mérite et de grand avenir. Élève de Lorain, chirurgien des ambulances de la Presse pendant le siège, estimé, aimé de tous, le docteur Faneau paya de sa vie le crime d’être resté fidèle à son ministère, entouré de respect chez tous les peuples civilisés.

Il semble que la vue de son sang ait exaspéré ses bourreaux. Dès qu’ils voient Faneau tombé, ils se précipitent dans la maison. Mais ils se trompent de porte : croyant aller à l’escalier, ils tournent à gauche, dans la chapelle ; il y avait là deux ambulanciers qui y ap-