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noyaient dans le sang une insurrection politique accablée. En septembre 92, en 93 et 94, un peuple livré par les déserteurs à l’ennemi, entouré de complots, trahi par des Français alliés à l’étranger, exaspéré par la misère et la faim, exposé à d’impitoyables invasions en même temps qu’à la guerre civile, pour sauver ses libertés et la patrie par un effort colossal, était en proie à toutes les colères et à tous les soupçons, apprenait par des désertions criminelles à se défier de tout le monde, et était obligé de réduire, par la terreur, ses ennemis à l’impuissance.

On sait dans quelles circonstances se firent les massacres de Septembre : le duc de Brunswick marchait sur Paris, qu’il avait promis de réduire en cendres : dans Paris même, les royalistes, unis de cœur avec l’envahisseur, menaçaient les patriotes de leur prochaine vengeance : des furieux se portèrent sur les prisons où étaient enfermés beaucoup de ces amis de l’étranger. Un affreux massacre eut lieu : quel fut le chiffre des victimes ?

Je veux faire la part belle aux monarchistes : je vais prendre leur compte. Je l’extrais du livre de M. Mortimer-Ternaux : Prison de l’Abbaye, 171 ; — la Force, 169 ; — le Châtelet, 213 ; — la Conciergerie, 328 ; — Carmes et Saint-Firmin, 120 ; — Bicêtre, 170 ; — Salpêtrière, 35. — En tout, 1,368.

C’est une évaluation très élevée. Les sources contemporaines donnent les chiffres de 1,079, 1,035, 1,005, 966. M. Michelet s’en tient à ce dernier chiffre ; M. Louis Blanc, à 1,035. Seul, M. Granier de Cassagnac a osé aller jusqu’à 1,458. Eh bien ! j’accepte le compte de l’écrivain catholique et royaliste. Mettons 1,368. — C’est ce qu’on tuait dans une seule fournée à la Roquette, en 1871.