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versaillais qui occupait le boulevard s’installèrent devant le café et se firent servir. Une balle, partie de la maison qui formait le coin opposé, siffla aux oreilles du commandant et blessa un officier près de lui. Les ordres les plus implacables furent donnés, la maison fouillée, quelques-uns de ses habitants fusillés.

Ils étaient innocents. La balle était partie de l’appartement du correspondant du Daily News dont j’ai déjà invoqué le témoignage, M. Crawford, et qui, depuis la Commune, habitait Versailles. Les coupables s’étaient blottis dans le cabinet de toilette, et avaient visé à travers les volets donnant sur le balcon. Le fait m’a été raconté à la place même d’où le coup avait été tiré.

Or, ces coupables étaient deux des soldats que le commandant amenait de Versailles.

Interrogés, ils répondirent qu’ils avaient été à Metz, et qu’ils ne pouvaient pardonner aux chefs qui, après les avoir livrés aux Prussiens, les conduisaient au combat contre Paris. Si étrange que ce fait puisse paraître d’après l’histoire convenue de la guerre civile, il n’est pas tout à fait isolé : et il y eut encore dans les journées de Mai des soldats, assez rares, il est vrai, qui refusèrent ou de marcher ou de tirer.

Les deux coupables furent passés par les armes.

Assez récemment on perça plusieurs rues allant du parc Monceau au boulevard Malesherbes. Pendant les travaux, on découvrit deux squelettes encore enveloppés d’uniformes de lignard.

Ainsi, dès les premières heures de l’entrée dans Paris, dans la matinée du lundi 22, l’armée fusillait de tous côtés. C’est aussi à partir de ces premières heures que l’on commença à former dans Paris ces longs convois de prisonniers, composés non seulement de gardes nationaux, mais aussi de Parisiens et de Pari-