Page:Pelletan - La Semaine de Mai.djvu/368

Cette page a été validée par deux contributeurs.

les fédérés, les partisans de la Commune, mais des milliers d’habitants paisibles, pris chez eux sur une dénonciation, des femmes, des enfants : il semblait qu’on prît des bêtes sauvages ; c’est ainsi que la presse les représentait.

Le Soir de M. Pessard, parlait en termes inqualifiables de ces brigands, ces femelles aux mamelles pendantes. Le Paris-Journal s’exprime dans un style plus violent encore : il s’agit d’un convoi de femmes :

« La bêtise, le vice et le crime étaient peints en traits sanglants et brûlants encore sur tous ces visages… quelques-unes essayaient un rire bestial : d’autres s’efforçaient de tirer une larme absente de leurs yeux rougis par la débauche et l’orgie. Toutes d’ailleurs joignaient à la laideur de l’âme la laideur du visage et la difformité du corps. »

La Patrie du 31 mai parle en ces termes des malheureux qui allaient passer devant la cruelle cour martiale du Châtelet, et que la foule regardait, comme je l’ai dit, attendre leur sort sur la terrasse du foyer :

« Un public nombreux stationne pour regarder ces misérables, absolument comme devant les cages des animaux féroces au Jardin des Plantes. Seulement, ceux-ci on les plaint d’être enfermés, tandis qu’on n’entend contre les premiers que des souhaits de vengeance ou plutôt de punition. »

Plus de pitié pour les tigres que pour les Parisiens, comme les blessés des Quinze-Vingts, comme tous les malheureux, absolument étrangers à la Commune, que nous avons vus passer devant la cour martiale !… Il est difficile d’aller plus loin. Et qu’on ne croie pas que de telles phrases soient des exceptions : c’est le style ordinaire des journaux.