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à Belleville-Ménilmontant, et prit part à la défense de Paris (contre les Prussiens), comme lieutenant de la garde nationale… Au mois de décembre, son état rhumatismal l’obligeait de quitter tout service… Le 29 mai, une lettre d’un cousin, son voisin, m’apprenait (en province) que mon père était à toute extrémité. Je pus entrer dans Paris le 1er juin au soir, après des démarches et formalités que vous devinez : mon père était mort. — Je le fis enterrer civilement le 4 juin, et je restai à Paris jusqu’au 7.

» Le matin du 2 juin, vers quatre heures, j’entendis un bruit de toile déchirée ressemblant à un feu de peloton mal fait. — Mais ce sont les moulins à café du Père-Lachaise. Oh ! esprit parisien ! C’est ainsi que les habitants désignaient les mitrailleuses qui remplaçaient les pelotons d’exécution…

» Je me rendis dans le chemin de Charonne : une brèche était pratiquée au mur : c’est par là qu’on introduisait sans doute les gens que l’on massacrait : on y ajoutait les malheureux qui s’étaient cachés dans les tombeaux, et qui, la faim aiguillonnant, sortaient de leurs cachettes…

» J’affirme de la façon la plus formelle et sur mon honneur que, jusqu’au 7 juin, jour où j’ai quitté Paris, chaque matin, de quatre heures à quatre heures et demie, ces exécutions avaient lieu au moyen de mitrailleuses, pendant une demi-heure. Il m’a été assuré par une famille habitant ce quartier que ces massacres se sont continués jusqu’au 12. »

Le lecteur, après ses détails, jugera ce que vaut le démenti indigné de l’Officiel au sujet du bois de Boulogne.

Ce qui était infâme à l’ouest de Paris ne l’était donc plus à l’est ?