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LVI

APRÈS

À la fin de mai, Paris était plein de cadavres : il y en avait partout, dans les rues, sur les places, dans les maisons, dans les appartements : il y en avait une longue file sur toute la longueur des berges de la Seine ; il y en avait qui suivaient la Seine au fil de l’eau. Le reporter d’un journal, qui prit la peine de les compter pendant quelques minutes, appelait cet exercice : « la pêche aux fédérés ». Des fosses où, provisoirement, on jetait les corps, restaient béantes çà et là.

Il fallut nettoyer ce charnier. Tout ce qu’on trouva de charrettes, de voitures, y fut employé. « Sur le boulevard Saint-Michel, dit la Liberté, les omnibus descendaient, s’arrêtaient à chaque barricade, et s’emplissaient peu à peu comme d’une marée de cadavres… L’aspect des voitures à travers lesquelles passaient des pieds et des bras était terrible. »

Il était temps ; une puanteur horrible remplissait l’atmosphère, et l’on craignait la peste.

On creusa à la hâte de vastes fosses dans les cimetières, au Champ-de-Mars, etc., on y jeta les corps avec une couche de chaux. Dans les casemates des fortifications, on brûlait les cadavres. La place manquait encore pour ensevelir tout. On en porta beaucoup aux portes de Paris, dans les tranchées d’Issy notamment. Beaucoup restèrent et sont encore, sous les pavés ou dans les terrains vagues de Paris. Les exhumations