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N’était-ce pas inouï : l’armée française soupçonnant l’armée prussienne d’empêcher Paris de mourir de faim ?

On peut juger, par là, du milieu dans lequel vécurent les officiers comme les soldats, quand ils n’étaient pas au feu. À cette époque, c’était presque un crime d’être resté à Paris. La grande ville était vraiment considérée comme un repaire de bêtes fauves qu’il fallait exterminer. Quelques jours après, on se vantait d’avoir tué des « communeux », comme on se vante d’un exploit cynégétique. Au moment de l’entrée dans Paris, les troupes furent averties de se défier, de refuser le verre qu’on leur tendrait pour étancher leur soif. Quelle pitié pouvait ressentir l’armée pour une population qu’on lui avait représentée comme une bande d’empoisonneurs et d’empoisonneuses ?

Nous avons analysé maintenant les trois causes qui transformèrent la prise de Paris en un vaste massacre. Ces trois causes sont : 1o la haine des généraux bonapartistes contre la grande ville républicaine ; 2o les desseins et les instructions du gouvernement de M. Thiers ; 3o l’influence des passions versaillaises sur l’armée.

Arrivons à la semaine de Mai.


IV

LES PREMIÈRES HEURES

Le matin du dimanche 21 mai 1871, l’armée assiégeait, au Point-du-Jour, un rempart en ruine et sans défenseurs. M. Ducatel, piqueur des ponts et chaussées,