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Et le Siècle évalue à dix mille le chiffre des cadavres des Buttes-Chaumont et du Père-Lachaise. Évaluation qui indique à quel point la lutte fut atroce.

À quoi bon entrer dans les détails de cette extermination ? Quelques exemples suffiront :

Aux Buttes-Chaumont, il y eut des pourparlers entre l’armée et les fédérés. La défense pouvait être acharnée, meurtrière ; elle ne pouvait être qu’inutile : du côté de l’armée on parlementa, on engagea deux ou trois fois les fédérés à se rendre. À la troisième, les fédérés se rendirent moyennant la vie sauve. Le commandant fédéré Seguin vint l’annoncer au commandant du bataillon de chasseurs à pied qui attaquait la butte.

Seguin lui dit : « Citoyen commandant…

— Appelez moi commandant ou monsieur ; je ne veux pas être appelé citoyen. »

On se querelle sur ces mots : l’officier fédéré traite le Versaillais de bonapartiste, de Vendéen ; l’officier de chasseurs charge un peloton d’exécution de répondre pour lui ; et Seguin meurt intrépidement, en commandant le feu de sa propre exécution.

Ainsi fut respectée la parole qui assurait « la vie sauve » aux fédérés mettant bas les armes.

La capitulation n’allait pas été conclue sans difficulté. Les femmes, les enfants, étaient enragés pour continuer la lutte, insultaient ceux qui voulaient se rendre. Les fédérés qui avaient mis bas les armes furent mis à plat ventre : des mitrailleuses étaient braquées sur eux. On leur dit : « Le premier qui bougera, nous tirons. »

Ils furent emmenés prisonniers.

Restaient quelques centaines de combattants, qui refusèrent de se rendre (quatre cents environs). Ils furent tous fusillés, jusqu’au dernier.