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de sabre qu’on obtint cette marque de respect pour la religion catholique, apostolique et romaine. Puis, il y avait dans la colonne un malheureux qui ne pouvait plus marcher. On le poussa d’abord du plat et de la pointe de sabre. Arrivé à la prison pour dettes, il fallut y renoncer… L’ordre fut donné de le fusiller… Une première balle lui cassa une jambe, une seconde l’acheva.

Tous les témoins savent que des faits semblables se produisaient presque partout.

Enfin, on formait les colonnes pour Satory. J’ai dit qu’on commençait par garrotter les prisonniers. J’ai déjà raconté cette opération à propos du parc Monceau, d’après le témoignage du docteur L***. Les prisonniers étaient attachés deux à deux. Un officier, sur une observation, serra si fort le réclamant, que le sang jaillit sur son voisin. J’ai, dans le récit manuscrit d’un prisonnier de Montmartre, une autre description de la même scène. Les prisonniers étaient réunis dans la salle de l’école de la mairie. Le capitaine V***, du 13e de ligne, envoya acheter de la corde. Son colonel, plus compatissant dit : « À quoi bon ? » Puis, sur l’insistance du capitaine, il céda. On fit ranger les prisonniers deux par deux, on attacha la main droite de l’un avec la main gauche de l’autre. Puis on passa une même corde dans tous les liens, en laissant entre chaque file la distance d’un pas.

J’ai cité le journal de Versailles qui disait que les prisonniers étaient attachés de « petites cordes qui ne gênaient pas leurs mouvements » : adorable euphémisme ! Puis la lettre naïve de l’artilleur qui écrit à sa famille :

« Je vous diré que quand on leur attache leur mains par deux il nous dise en pleurant ne me sairé pas trop. »

Les voilà maintenant en route pour Versailles. Mais