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blique française, dis-je, dans son numéro du 3 avril 1872, a consacré tout son feuilleton à la mort de Tony-Moilin. J’ai eu depuis, des sources les plus sûres, les détails les plus précis et les plus authentiques.

« Le docteur Tony-Moilin, me dit une note du docteur Robinet, exerçait une médecine spéciale, une thérapeutique de son invention». Il avait chez lui, rue de Tournon, un laboratoire où se trouvaient des provisions d’éther. Je cite ce détail parce qu’il n’a pas été sans influence sur sa condamnation. Ardemment attaché à la cause de la démocratie socialiste, Tony-Moilin crut voir sonner, le 18 mars, l’heure des réformes qu’il rêvait. Il occupa la mairie du VIe arrondissement, en expulsa la municipalité légale présidée par M. Hérisson, en fut à son tour expulsé par un retour des gardes nationaux de l’ordre, et finit par la réoccuper. Il avait signé et donné aux magistrats municipaux auxquels il se substituait une pièce en règle, une sorte de décharge et de procès-verbal d’expulsion.

Mais la tournure que prirent les choses ne tarda pas à l’écarter du mouvement. Il s’aperçut, au bout de deux jours, qu’il s’était trompé en attendant du 18 mars le régime qu’il rêvait. Profondément découragé par les événements violents qui se succédaient, il renonça à toute situation politique : il ne voulut d’autre rôle dans la guerre civile que celui qui consiste à soigner les blessés ; il redevint premier aide-major dans le 193e bataillon.

C’est dire que si un caractère sérieux avait pu être attaché aux promesses faites par le gouvernement de Versailles, Tony-Moilin, après la prise de Paris, n’aurait même pas dû être recherché. Sa participation au mouvement avait cessé le 20 mars ; à maintes reprises, M. Thiers avait promis aux délégués de toute sorte