Page:Pelletan - La Semaine de Mai.djvu/155

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ce général, ce ministre du lendemain, assiste à cette scène, et donne cet ordre barbare, où le meurtre d’un député se complique d’une prolongation de souffrances et d’une mise en scène à effet : il lui faut la colonnade du Panthéon, il lui faut l’agenouillement théâtral du représentant du peuple qu’il va faire tuer, il lui faut encore une promenade de cette agonie sous les huées, il lui faut la torture morale, les brutales insultes d’une humiliation suprême… Voilà l’idée qui vient à ce général, tout en déjeunant, tout en regardant le drame, d’un coin de table encore servie… Et cet homme c’est le Cissey que nous avons vu, le masque aux lourdes paupières endormies, à la parole inarticulée comme un roulement de tambour, à la physionomie éteinte par une lassitude qui semblait toujours renouvelée… c’est le ministre que M. de Mac-Mahon lui-même a été obligé de congédier… Pourquoi ?… Peu m’importe.

Et ce député !… Il y avait là un député, un droitier, un marquis, un certain de Quinsonas, — qui n’a pas fait grand bruit dans sa vie ; seulement, au 18 mars, il avait été arrêté au faubourg Saint-Antoine. Il en était fier ; et comme il s’était trouvé dans la commission d’historiens chargés de l’Enquête du 18 Mars, il faisait valoir sa petite arrestation, qui avait duré quelques minutes. Et dans les procès-verbaux de l’Enquête, on le voit interrompre tous les témoins, pour leur raconter une fois de plus sa petite aventure[1].

La qualité de représentant de la nation était tombée

  1. Nous avons reçu, à propos de ce récit, la lettre suivante :
    Paris, le 8 février 1880.
    Monsieur Camille Pelletan,

    Je lis, dans la Justice de ce jour, un paragraphe relatif à M. le marquis de Quinsonas.

    En effet, le 20 mars, M. de Quinsonas, qui arrivait de Greno-