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» — On a fusillé Millière devant nous.

» — Alors, interrompit-il, vous avez dû entendre les coups de revolver qu’il a tirés sur la troupe !

» — Les coups de revolver qu’il a tirés sur la troupe ? Mais, répondis je, depuis trois quarts d’heure il était entre deux haies de soldats et les mains vides lorsqu’il est tombé au Panthéon.

» — Nous avons reçu un rapport officiel qui constate ce que je vous dis.

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» Quelques heures plus tard, causant avec Leymarie, je lui faisais observer que, partis de la place du Panthéon au moment même où Millière venait d’expirer et conduits très rapidement à Versailles, nous y trouvions le procès-verbal de son exécution. »

Notez bien qu’avant la fusillade, M. L. Mie avait vu Millière amené au Luxembourg par les soldats qui venaient de l’arrêter : ces soldats, la foule amassée là, celle qui l’avait suivi depuis le Panthéon, le couvrait d’injures : Millière resta quelque temps collé au mur du Luxembourg, au milieu des invectives, et ni M. Mie, ni M. Marpon ni son ami qui se trouvaient là en même temps et qui furent hués pour avoir fait une observation, n’avaient entendu parler de ces prétendus coups de feu. C’était pourtant le premier bruit qui devait se répandre dans le public, le premier mot que les soldats, venant d’essuyer la décharge du revolver, devaient jeter à la foule, le premier reproche que les hurleurs devaient lancer à la victime.

Pourtant, il n’en est pas question : et le fameux revolver paraît seulement à Versailles, dans le rapport officiel par lequel l’autorité militaire annonce (et justifie), au moment même où elle a lieu, la mise à mort d’un représentant du peuple.