Page:Pelletan - La Semaine de Mai.djvu/132

Cette page a été validée par deux contributeurs.

déjeuner avec sa femme et ses enfants. L’infortuné avait un pantalon de garde national. Il est fusillé rue Vaucanson.

Les soldats revinrent, et fusillèrent, à la porte de la maison, trois autres personnes : deux Belges et un maçon, ce dernier devant sa femme.

Si l’on était impitoyable pour les pantalons à bande rouge, on pardonnait encore moins aux souliers de la maison Godillot : c’était la chaussure de l’armée : elle semblait accuser un déserteur. J’ai déjà signalé une exécution de ce genre faite le lundi, dès l’entrée des troupes dans Paris ; il est inutile de multiplier les exemples.

J’ai déjà montré aussi que les mains noires étaient toujours supposées noires de poudre ; j’ai cité à Montmartre, un teinturier à qui la teinture dont ses mains étaient souillées avait coûté la vie ; aux Halles, un homme couvert de farine, qui, d’après le Français, fut exécuté parce que la paume de ses mains était aussi noire que le dessus était blanc.

Un autre, au Châtelet, était réquisitionné pour travailler avec les soldats à éteindre l’incendie. Il était noir de suie. La besogne finie, on lui permet d’aller se laver à la rivière. Il est arrêté en route, et fusillé pour la couleur de ses mains !

On faisait plus : on obligeait les prisonniers à se déshabiller, et on cherchait sur leurs épaules s’il y avait une marque indiquant qu’une crosse de fusil y avait été appuyée.

Plusieurs témoins nous attestent ces faits : entre autres, un ancien aide-major, qui soignait alors les blessés à Lariboisière.

Les soldats eux-mêmes ne furent pas épargnés. Je ne parle pas, bien entendu, des soldats passés à la Com-