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très pâle : on avait fusillé comme fédéré ce réfractaire altéré du sang de tous les fédérés..

Le nombre de personnes exécutées pour le même motif est considérable : depuis le premier siège, beaucoup de Parisiens portaient au moins une partie de leur uniforme de garde national : on avait repris la blouse, on gardait le pantalon. Beaucoup n’en avaient pas d’autres. Qui aurait pu imaginer que ce fût un crime, et qu’on fusillerait les hommes pris, non seulement les armes à la main, mais encore le pantalon aux jambes ?

Boulevard Magenta, des officiers étaient assis à la terrasse du café des Deux-Hémisphères. Le combat était fini là depuis longtemps, car on était en train de démolir la barricade. On sait qu’un ou deux jours après la prise d’un quartier, l’autorité militaire obligeait les passants à déblayer les rues. Les fédérés les avaient contraints à mettre chacun un pavé : l’armée régulière les contraignait à rester à la besogne jusqu’à ce qu’elle fût terminée. M. Lafont, le conseiller municipal, étant gravement malade et incapable du moindre effort, fut, à Montmartre, brutalement menacé parce qu’il représentait qu’il était hors d’état de soulever des pavés : il fallut qu’il s’y mît.

Les officiers regardaient donc les travailleurs.

Un d’eux, en se baissant, laissa voir sous sa cotte de travail la bande rouge d’un pantalon dénonciateur. Un des officiers cria : « En voilà encore un !… Au mur ! » Quelques instants après, le malheureux était fusillé contre le presbytère de l’église Saint-Laurent.

Il n’était pas prudent, comme on le voit, de sortir, quand on portait un pantalon du premier siège. Et si l’on restait chez soi ?… Le 25 mai, un détachement de la ligne faisait des perquisitions rue du Vertbois. Il entre au 52, pénètre chez M. Legris, négociant, en train de