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pas découverts. Peut-être n’a-t-il goûté seulement qu’une certaine méchanceté, un certain goût de me jouer un mauvais bon tour. Emporté par cette passion de méchanceté, par ce goût de me brimer, de me berner, par son orgueil et par cette infatuation de faire rire de moi, peut-être en effet n’a-t-il pas fait attention du tout à ce qu’il écrivait, ou pas assez. Peut-être n’a-t-il pas regardé du tout ce qu’il écrivait. Une autre version, une autre leçon serait que même s’il le voulait, même quand il y regarde, même quand il y fait attention il est bien incapable de savoir ce qu’il écrit. Je dois avouer que cette seconde version aurait plutôt plus de partisans. On me le représente généralement comme un fort sot. D’ailleurs les deux versions ne sont pas contradictoires. Il peut fort bien être ensemble sot et fat. Ne pas faire attention et ne pas en voir plus s’il faisait attention. Seulement, quand on en est là, on n’exerce pas, régulièrement, le magistère de la critique littéraire dans une de nos plus importantes revues.

Si M. Laudet a choisi M. le Grix, il doit tout de même savoir un peu qui il a choisi. Si M. le Grix lui a été imposé par quelqu’un, il doit savoir un peu qui on lui a imposé.

Si M. le Grix a vu ce qu’il faisait, il a été fourbe. S’il n’a pas vu ce qu’il faisait, généralement s’il ne voit pas ce qu’il fait, il a été sot. Maintenant il peut avoir été fourbe et sot à la fois. Quand nous étions au lycée, je crois que c’étaient les propositions contraires en logique formelle qui étaient telles que ou bien l’une était vraie et l’autre fausse ; ou bien l’une était fausse et l’autre vraie ; ou bien elles étaient fausses toutes les deux. Mais elles ne pouvaient occuper que ces trois positions.