sition de M. Laudet une ignorance, un manque, ce que l’on serait presque tenté de nommer une hérésie humaine, c’est-à-dire une hérésie en matière d’humanité, de connaissance et d’histoire de l’humanité. M. Laudet a l’air de croire que l’humanité, en elle-même, que l’homme aurait moins besoin de Dieu et de Jésus qu’au « quinzième ». Croit-il donc, cet homme heureux, que la bassesse, que la misère, que la détresse de l’homme est devenue moindre. N’a-t-il donc jamais entendu parler, n’a-t-il donc jamais entendu dire, même par des laïques, même par des profanes, même par des historiens, même par des modernes, même (au sens et) au point de vue purement humain que la misère de l’homme moderne, que la détresse du monde moderne est une des plus profondes que l’histoire, (même purement humaine), ait jamais eu à enregistrer. Croit-il donc, ce rare génie, que l’humanité soit devenue moins douloureuse. Croit-il qu’on ait changé le cœur. Qu’on ait perfectionné le cœur humain. Croit-il que le père qui voit son enfant malade souffre moins qu’au « quinzième ». Qu’il ait moins besoin de la prière et des sacrements. Croit-il que l’homme qui meurt meure moins qu’au « quinzième » et que l’homme qui vieillit vieillit moins qu’au « quinzième » et que l’humanité n’ait plus la même capacité qu’au « quinzième » de détresse et de ce qu’ils nomment neurasthénie. On reconnaît bien là l’incurable frivolité du gros bourgeois français. La même capacité de vide et de creux et d’absence. Les mêmes déficiences, les mêmes manques. Croit-il donc, ce gros capitaliste, et pour nous en tenir à ce seul exemple, à ce seul cas, croit-il donc que l’anxiété du pain quotidien ait diminué dans le monde et qu’il n’y ait pas autant d’hommes
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